Éditorial Articles Actes de séminaire Comptes rendus Autres regards

No 2, 2008


Fantasmes érotiques: un regard anthropologique
(versão portuguesa)


Guadalupe Brak-Lamy1, Ph.D.


INTRODUCTION

Cette communication fait partie de ma recherche de doctorat sur les comportements érotiques-amoureux hétérosexuels en contexte urbain nocturne2. Les comportements érotiques-amoureux englobent les fantasmes érotiques et les stratégies de séduction. Dans cette recherche, les stratégies de séduction sont des formes d´interaction érotique qui englobent l`exhibition corporelle, les regards, les sourires, les paroles/conversations, les caresses, les embrassades et les baisers (Brak-Lamy, 2006).

Ma recherche a été réalisée dans quatre bars situés au centre de Lisbonne. Dans le cadre d’entretiens en profondeur, j`ai interviewé 120 individus (60 femmes et 60 hommes) âgés entre 18 et 65 ans, appartenant à la classe moyenne et d’états civils variés : mariés, séparés, divorcés, célibataires et vivant en union libre. Les entretiens ont été réalisés dans les bars et surtout sur les terrasses extérieures, entre avril 2000 et octobre 2001. L`interprétation des entretiens est ancré sur le modèle de l`analyse de contenu (Bardin, 1977; Vala, 1986 ; Laville et Dionne, 1999).

Concernant les fantasmes érotiques, la question que j`ai posée aux individus qui fréquentent ces lieux était : quels sont leurs fantasmes érotiques lorsqu’ils sont dans les lieux de rencontres nocturnes et lorsqu’ils sont hors de ces lieux, chez eux.

Les objectifs visés étaient : a) tracer le portrait des fantasmes masculins et féminins les plus fréquents dans les boîtes de nuit (fantasmes secrets) et dans le contexte privé (fantasmes secrets et fantasmes partagés); b) analyser psycho-socio-culturellement les différences des thèmes fantasmatiques en ce qui concerne les hommes et les femmes selon différents états civils et différents groupes d`âge.

Cette recherche sur les fantasmes érotiques est semblable aux études de Person et al. (1989) et de Hsu et al. (1994), mais dans un contexte différent. Ces derniers travaillaient en contexte universitaire (classe moyenne supérieure), alors que je travaille avec les habitués des boîtes de nuit (classe moyenne). J`ai utilisé les entretiens qualitatifs et exploratoires alors qu’ils ont utilisé des enquêtes quantitatives.

Les travaux que Claude Crépault (1981) et son équipe ont entrepris à la fin des années soixante-dix et dans les années quatre-vingt afin de répertorier et analyser le contenu des fantasmes qui apparaissent le plus couramment dans la population féminine et masculine sont plus développés que mon travail.

Mon approche est ancrée sur la théorie des fonctions des fantasmes (Crépault, 1981, 1997), les théories de l´apprentissage social (Person et al.,1989 ; Olivier et Hyde, 1993) et à la théorie du développement du système de transformation socio-historique-culturelle (Brak-Lamy, 2006).

J’utilise la définition du fantasme telle que préconisée par Crépault (1997) : «le fantasme érotique est produit de l`imaginaire et peut se présenter sous la forme d`une image mentale, d`une série d`images ou d`un scénario structuré, tout comme il peut se réduire à une impression intrasubjective.» (p. 271). En ce qui concerne la théorie des fonctions des fantasmes, on fera référence à la fonction hédoniste et à la fonction compensatoire.

La théorie de l’apprentissage social met l’accent sur la transmission/construction socio-culturelle de l`identité féminine ou de la féminité (comment on doit être une femme) et de l`identité masculine ou masculinité (comment on doit être un homme). Cette théorie est ancrée sur la matrice culturelle judéo-chrétienne.

Quant au développement du système de transformation socio-historique-culturel, on signale le développement des différents industries de consommation érotique, l’expansion progressive des moyens de communication de masse (médias), l`importance des mouvements néo-féministes, la divulgation de la contraception orale et l´affaiblissement du contrôle parental sur les comportements des enfants.


FANTASMES ÉROTIQUES DANS L`ESPACE PUBLIC: FANTASMES SECRETS



Dans les différents lieux de rencontres que j`ai étudiés, quelques
individus des deux sexes m`ont révélé les fantasmes secrets qui les habitent pendant qu`ils s’y trouvaient.

Les gens qui ont imaginé ces fantasmes ne les ont pas révélés à personne (seulement à l`anthropologue), puisque ces fantasmes font partie du monde secret de leurs vies. Ce scénario est analogue à celui de la masturbation dans lequel l`individu peut s`imaginer en train de faire l`amour avec quelqu`un mais où il est en train de faire l`amour avec son corps. L`individu ferme la porte de la chambre ou de la salle de bain et fait ce qu`il veut, et personne n`est là, ni les parents, ni la femme (ou le mari), ni son amoureux (euse), ni sa famille, ni les amis ; il n`y a même pas une caméra occulte en train de filmer. Comme ça, l`individu n`est pas sous le regard de l`autre, il peut réaliser des fantasmes qui représentent un compromis entre l`acte réprimé et la projection de l`acte sur un autre, pendant qu`il est l`exécuteur, réel ou symbolique, des désirs "indicibles" ou "irréalisables".


Fantasmes secrets masculins

Quelques fantasmes érotiques masculins sont imprégnés d`agressivité phallique4, surtout chez des jeunes célibataires, âgés entre 18 et 30 ans et chez des divorcés, âgés entre 30 et 45 ans. Je vais vous rapporter un de ces cas:

«Un des individus, âgé de quarante-deux ans, m`a raconté que, quand il
 était assis au balcon (dans le "Mirror") en buvant son whisky, il a vu une 
jeune femme âgée de vingt-cinq ans passer près de l`endroit où il se
 trouvait. Il m`a décrit ses vêtements et son maquillage dans les moindres détails: "elle portait une minijupe en cuir noir, un top blanc, des bas en
filet blanc, ses souliers en vernis à haut talons, des boucles d`oreilles en
 argent, un fil de cuir noir avec une croix d`argent sur le cou. Les lèvres
 étaient peintes de rouge et ses yeux bleus avaient une trace de crayon noir sur
 les paupières, qui étaient encore soulignées de mascara lilas. Les cheveux de 
la jeune fille étaient longs, d`un blond doré avec de petites tresses. "
L`homme a été fasciné par cette physionomie féminine : "Ma volonté était 
de causer avec elle et après la saisir de ma main, mais je n`ai pas eu le 
courage. Alors j`ai commencé à fantasmer qu`elle venait à ma rencontre.
 Elle a causé avec moi, après je lui ai caressé les cheveux, en passant la 
main droite sur la tête, puis sur les épaules, après les bras et enfin les jambes. Après je l`ai jeté violemment contre ma poitrine et je l´ai conduite dans la toilette des hommes. Nous sommes entrés dans le petit compartiment qui n`avait qu`un cabinet et là elle me met contre le
 mur et commence à me faire le sexe oral. "Ça a été simplement merveilleux" a-t-il conclu» (Extrait du journal de terrain, p. 31).


Plusieurs individus (indépendamment de l`âge et de l`état civil) ont rapporté le fantasme lesbien. Je vais parler d`un de ces cas: 


«Un jeune homme âgé de vingt-trois ans m’a dit: "Une nuit chaude de
 septembre j`ai décidé de sortir seul. La journée s`était mal passée, parce
 que la classification à l`examen du cours d`ingénieur ne s’était pas bien déroulée. 
J`avais beaucoup étudié et je n`ai eu que 9 sur 20. Cette nuit-là je suis 
sorti de la maison à vingt-trois heures vers mon bar favori où il y a de la musique cubaine. J`ai choisi une table
 à l`étage supérieur. Une serveuse qui portait des jeans clairs
 très ajustés, élastiques, top blanc et baskets blancs aussi, m`a demandé 
ce que je voulais comme boisson. J`ai fixé mon regard sur le coeur noir
 qu`elle avait tatoué sur son ventre et après j`ai commandé une « cuba libre ».
 Quand elle m`a donné la boisson j`ai fixé le tatouage. La jeune fille est partie et j`ai commencé à imaginer que je me trouvais dans un
 complexe touristique dans les Bahamas et qu`elle était venue à ma rencontre 
alors que nous étions tous deux dans la piscine. Elle a commencé à me regarder puis a nagé dans ma direction. Quand elle est arrivée auprès de moi 
elle m’a touché doucement sur le dos avec le tatouage de son ventre. Je me suis retourné et elle m`a embrassé. Après je lui ai embrassé les lèvres, depuis les oreilles et, ensuite, le cou. Tout de suite je l`ai tirée de la piscine et je 
l`ai amenée sur la pelouse où était la serviette. Je l`ai couchée sur la serviette et j`ai commencé à lécher le tatouage et la zone qui l`entourait.
 Soudainement, une jeune fille brune, de grande taille, s`approche de nous. Je
 l`ai ramenée près de nous et j`ai commencé à faire l`amour avec les deux.»
 (Extrait du journal de terrain, pp 29-30).

Sur le fantasme lesbien, ça corrobore l`opinion de Person (1996) à l’effet que le fantasme lesbien imaginé par les individus hétérosexuels réside dans le pouvoir que les hommes éprouvent quand ils dominent deux femmes, sans avoir à les partager avec les autres hommes. La masculinité est présente dans la domination des femmes et dans la compétition avec les autres hommes. 

Dans les deux cas décrits, le fantasme est une extension de la réalité.

Fantasmes secrets féminins 

Au contraire des fantasmes secrets masculins, les fantasmes secrets féminins (surtout des femmes célibataires, âgées entre 20 et 35 ans) dans l`espace privé n`ont rien à voir avec des scénarios de
domination – ou de ménage à trois, ou d`avoir plusieurs partenaires sexuels, ou de pratiquer le sexe anal. Les fantasmes féminins se rapportent aux scénarios plutôt romantiques. Voici un exemple de scénario romantique construit à partir du réel:

«C`était un samedi du mois d`août. Je suis arrivée au bar, il était presque
 minuit, accompagnée de deux amies de mon âge. Après que nous soyons entrées, nous nous sommes dirigées au comptoir et nous avons bu des marguaritas au son de la musique espagnole. J`ai regardé un des danseurs en particulier: le plus grand et le plus élégant. Le spectacle s`est terminé à une heure du matin. Alors mes amies sont allées danser au son des musiques latino-américaines. Je n`ai pas voulu y aller, je suis restée au
 comptoir en buvant. Je n`arrêtais pas de penser au danseur et j`ai
 commencé à imaginer qu`il venait me tenir compagnie. En arrivant
 auprès de moi il m`a souri et après il a pris ma main droite, l`a embrassé
e doucement et m`a fait cadeau d`une resplendissante rose rouge.» (Extrait du
 journal de terrain, p. 49).

En général, les différences de genre en ce qui concerne les fantasmes érotiques dans l`espace public dénotent que la plupart des femmes (surtout les célibataires entre 20 et 35 ans) ont une très forte préférence pour des fantasmes qui reflètent une intimité émotionnelle : aimer la conversation après et avant de faire amour, toucher /embrasser doucement, être touchée/ être embrassée doucement, aimer recevoir des fleurs et marcher main dans la main avec son partenaire. D`autres fantasmes féminins dénotent un désir de vivre avec le partenaire ou se marier avec lui et avoir des enfants. Les femmes rapportent aussi des fantasmes qui reflètent une certaine vulnérabilité émotionnelle : être protégée par quelqu'un qui sera son partenaire. 

Les fantasmes masculins montrent la permanence de caractéristiques de domination et de déploiement d`agressivité phallique: forcer l`autre à avoir des relations sexuelles avec lui quelques fois avec rabaissement et sadisme; inciter deux femmes à faire l`amour pour qu`il puisse les voir; faire l’amour avec deux femmes; séduire et faire l`amour avec une femme beaucoup plus jeune que lui et faire l`amour avec une fille vierge. 

Ces différences des fantasmes masculins et féminins existent parce que, en ce qui concerne les femmes (surtout les femmes célibataires et les mariées âgées entre 25 et 45 ans), le conditionnement social inculqué par le modèle de pensée judéo-chrétienne à travers les parents et la famille transmet les idées suivantes de la féminité: «les femmes ne doivent pas dissocier amour et sexualité» ou encore «les sentiments amoureux servent à légitimer l´attirance physique et le plaisir sexuel». Les femmes sont socialement punies par des regards intimidants et/ou par des réprobations verbales si elles débutent leurs activités sexuelles à 13 ou 14 ans, si elles ont plusieurs partenaires sexuels et des partenaires sexuels occasionnels (seulement pour une ou quelques nuits - one night stand). Les femmes doivent aussi, d`après le modèle social, avoir un amoureux avec qui elles seront mariées et auront des enfants. 

Pour les hommes (n´importe quel âge ou état civil) la masculinité est transmise surtout par les parents. La masculinité veut dire être sexuellement actif depuis l`adolescence, avoir une bonne performance sexuelle et plusieurs partenaires sexuelles. Ça renforce la virilité et donne du prestige. Ce point de vue préconise le double standard soutenu par la théorie de l`apprentissage social. 


FANTASMES ÉROTIQUES DANS L`ESPACE PRIVÉ: FANTASMES ÉROTIQUES SECRETS ET FANTASMES ÉROTIQUES PARTAGÉS 

Les fantasmes érotiques dans l`espace privé sont ceux vécus hors des lieux de rencontres nocturnes, en général ils sont imaginés et mettent en scène le partenaire sexuel réel. 

Fantasmes érotiques masculins secrets 

Beaucoup d`hommes mariés (surtout ceux âgés entre 40 et 65
ans) nous ont dit qu`ils arrivent à développer le désir sexuel pour leurs épouses quand ils s`imaginent en train de faire l`amour avec une autre femme
qu`ils ont vu dans les lieux de rencontres nocturnes, ou une femme avec qui ils ont eu une relation érotique-amoureuse clandestine. Le compte-rendu suivant est illustrateur de cette idée :

«Les relations sexuelles avec ma femme ne sont satisfaisantes que si j`arrive
 à fantasmer quelque chose que j`ai déjà vécu avec une autre femme qui était dans les bars, ou quelque chose que j`aimerais avoir vécu (...). Parfois, j`ai des fantaisies érotiques avec une femme qui a été ma maîtresse. En général ces fantaisies ont lieu avant et durant l`acte sexuel. Pour moi elles me stimulent, fonctionnent comme un lubrifiant (...) Jamais je n`ai dit à ma femme que j`ai des fantasmes sexuels avec d`autres femmes. Si je lui disais ça pendant l`acte sexuel ce serait la fin, je gâcherais tout. À quoi bon gâcher ce qui nous donne du plaisir?» (L.57 ans, marié).

Les fantasmes facilitent un "scénario pour le désir" (Laplanche et Pontalis, 1968, 1973, et 1990), en agissant comme stimulant à l’excitation sexuelle . Celui-ci peut être défini
comme la faculté qu’a l`être humain de s`érotiser à partir de représentations mentales conscientes et inconscientes (Crépault, 1997).
Nous faisons ressortir une fonction des fantasmes: la fonction compensatoire qui se trouve plusieurs fois présente dans la vie
d`un couple, quand le fantasme compense une "réalité" peu excitante. C`est-à-dire, si la sexualité conjugale devient routinière, quelques images
peuvent donner l`illusion de nouveauté et faire ranimer l`excitation. D`une façon générale nous pouvons affirmer qu`une grande partie de fantasmes sont une compensation pour une réalité qui ne satisfait pas ou qui manque. 

Dans "La Création Littéraire et le Rêve Éveillé", Freud a écrit: «Les forces qui motivent les fantaisies sont des désirs insatisfaits et toutes les fantaisies sont la réalisation d`un désir, une correction de la réalité
non satisfaisante» (1989, p. 149). 

Beaucoup d`individus mariés (surtout les individus âgés de 45 à 65 ans) disent qu`ils ont une zone de vie privée dont leur épouse ne fait pas partie. Pour eux, ce qu`on imagine et qu`on ne pratique pas ne met pas le mariage en danger:

«J`aime beaucoup avoir des fantaisies sexuelles avec d`autres femmes (...). Je ne dis rien à ma femme, elle ne doit pas le savoir (...). Tout ce qu`on fantasme et que l’on ne pratique pas n`a aucune importance. Ce n’est pas ça qui
 me ferait divorcer de ma femme. D`ailleurs, je vous dit ça: si je n`avais pas
 des fantaisies sexuelles avec d`autres femmes, peut-être je me serais déjà
 divorcé (...). Sans les fantaisies sexuelles la vie n`a aucune grâce et les
 mariages deviennent tellement gris (...)» (P., 54 ans, marié).

Ce que ce discours nous laisse voir est qu`il n`existe pas de relations
 satisfaisantes, il y a toujours une marge d`insatisfaction. Ce qui advient de plus en plus est que plusieurs individus gardent en mémoire, comme fantasme érotique, un souvenir de plaisir concernant un rapport sexuel du passé survenu suite à une rencontre dans un bar de Lisbonne :

«Je me souviens d`une femme mariée, environ trente-cinq ans qui est venue au lit avec moi. Moi, à cette époque j`étais aussi marié et j`avais trente-huit 
ans. Ça a été une nuit merveilleuse. Elle m`a procuré des moments de 
plaisir très intenses (...). Nous avons fait du sexe oral, du sexe anal, le
 "soixante neuf", enfin, elle était comme une acrobate. Je ne sais pas bien
 son âge parce que je ne lui ai pas demandé, mais je sais son nom, elle
 s`appelait Joana. Elle a été la meilleure femme que j`ai eue au lit. Je 
me rappelle tout: des soupirs, des gémissements, des cris, de son visage, de ses courbes, et quelles courbes! De ses seins en forme de melon, de son beau cul. Je me rappelle que la lampe était dorée et avait la forme d`une fleur et que le lit était en acier peint de doré.. (...). Sept années se sont déjà écoulés et jamais je n`ai oublié ce moment. Je dis moment parce que ça a été
 seulement une nuit (...). Je l`ai rencontré dans un bar, elle était
 accompagnée de deux amies et moi j`y étais allé, accompagné d`un ami à 
moi. Nous avons dansé une demi-heure, nous avons causé un petit peu et 
après, nous sommes allés dans une pension (...). Nous n`avons pas échangé 
des mots doux ou romantiques, ça a été du sexe pur et dur. Jamais nous nous 
sommes revus, mais ça n`était pas notre objectif.» (A., 45 ans, divorcé).


D`autres hommes mariés (45 - 65 ans) m`ont raconté que lorsqu’ils ont des relations sexuelles avec leurs femmes, ils imaginent les aventures sexuelles qu’ils ont eues avec d`autres femmes et ces souvenirs les stimulent à dire des gros mots. Leurs femmes sont de cette façon comparables aux prostituées, c`est-à-dire des objets sexuels rabaissés5

Les hommes célibataires et les divorcés (surtout ceux âgés entre 18 et 45 ans) ont les fantasmes érotiques (imaginés et agis dans le réel avec le partenaire) suivants : avoir des organes génitaux oralement stimulés (sexe oral) ; pratiquer le sexe anal ; faire le soixante-neuf ; être masturbé ; caresser la poitrine d`une femme ; voir d`autres personnes avoir des activités sexuelles; avoir une activité sexuelle avec une femme inconnue, avec deux ou plusieurs femmes ; séduire une femme et être séduit par une femme. On peut conclure que l`imaginaire érotique de ces hommes est basé sur une sexualité très génitalisée et renforce la virilité. 

Fantasmes érotiques masculins partagés

 

Quelques individus mariés (35 à 55 ans) disent avoir agi dans le réel, avec leur partenaire, des fantasmes sexuels avec leurs épouses. Les fantasmes partagés se prêtent à la représentation de la zone de jeux privée, partagée par les amants. Il existe des scénarios ou saynètes où les partenaires remplissent des rôles complémentaires, un d`eux simulant être une prostituée et l`autre, un client, ou alors un faisant le rôle d`un sadique et l`autre d`un masochiste, dont le fantaisiste peut changer les rôles, alternant les rôles sadiques avec les masochistes dans une relation (Person, 1996). 

Ces fantasmes conjoints peuvent arriver quand un des partenaires affirme: "J`aimerais savoir qu`est-ce qu`on ressent à être attaché" et l`autre commence par le saisir et après fini par l`attacher. C`est ce qui est arrivé a H. (47 ans, homme d`affaires, marié):

«Parfois, quand je suis avec mon épouse, je lui demande de m`attacher au lit, (pieds et mains) et de me mettre un bandeau sur les yeux. Après je lui prie de se mettre sur moi et me frapper dans différentes parties de mon corps. Je
 n`aime pas le fouet. J`aime être battu de ses propres mains.»

Cet individu peut se sentir complètement en paix avec ses fantasmes masochistes, les envisageant comme un repos bienvenu de l`expérience quotidienne d`être obligé à commander. 

On remarque que les célibataires jeunes (18-30 ans) et vivant en union libre ont mentionné des fantasmes érotiques partagés dans l`espace privé qui se rapportent à la génitalité de l`érotisme: pratiquer le sexe anal; faire le «soixante-neuf»; être stimulé oralement pour une femme; être masturbé par une femme et voir la partenaire se masturber. Ces fantasmes ont une fonction hédoniste ou de plaisir: «le fantasme peut contribuer à l`éveil et à l`activation de l`excitation érotique, tout comme il peut faciliter le déclenchement de l`orgasme.» (Crépault, 1997, p. 301). 

On fait ressortir le fait que presque tous les hommes interviewés 
(indépendamment de l`état civil et de l`âge) parlent plus ouvertement de
leurs fantasmes sexuels que les femmes. La majorité des
hommes interviewés parlent beaucoup plus avec les amis (fantasme partagé
 homophilique) et avec la partenaire sexuelle (fantasme partagé hétérophilique)
que les femmes. 

Fantasmes érotiques féminins partagés
 

Il y a des femmes, surtout les jeunes célibataires (âgées entre 18 et 30 ans) qui aiment exercer du pouvoir sur leurs partenaires sexuels et disent aux hommes «maintenant, je vais t`attacher. Tu resteras immobile.» 

Dans ces fantasmes réalisés, les femmes exercent un contrôle sur les réactions et les émotions masculines, en reversant les rôles, dominant le partenaire et prenant quelques fois une revanche sur la réalité. 

Au contraire, le scénario masochiste d`être attachée des pieds et mains et avec un bandeau sur les yeux nous a été référé par quelques femmes (surtout les jeunes mariées, et vivant ensemble, âgées entre 25 et 40 ans). Voici ce que nous a dit une des femmes interviewée:

«J`avais un fantasme d`être attachée (par des menottes) et sentir que je ne pouvais pas bouger, ce qui est très difficile pour moi, parce que je suis
 quelqu`un qui aime toucher et saisir. Avoir les pieds et les mains attachés et ne pas 
pouvoir me délivrer, être explorée au détail et ressentir tout mon
 corps. Mon mari m`a dit qu`il avait aussi ce fantasme et lui, après, a eu
 le même traitement (...). » (M., 34 ans, mariée).

Quelques femmes, particulièrement les plus jeunes (25-35 ans), célibataires et vivant en union libre, partagent leurs fantasmes avec leurs partenaires sexuels (fantasmes réalisés), la plupart du temps pour maintenir l`intérêt6 de l’homme et/ou pour ressusciter une relation amoureuse qui était en train de se dissiper. Ici le fantasme dévoilé exerce une fonction compensatoire:

«Nous étions amoureux depuis sept ans. Les relations sexuelles ont commencé à entrer dans la routine (...). J`ai pensé que mon amoureux avait assez de moi et je lui ai demandé ce qui se passait. Il m`a répondu que nous devions plus changer le niveau sexuel. Alors, quand j`étais en train d`avoir des relations sexuelles avec lui j`ai commencé à imaginer des scénarios paradisiaques7 avec des positions sexuelles sur les roches d`une plage ou même dans une autre 
planète. Il y a eu un fantasme qu`il a aimé: faire le "soixante-neuf" 
quand nous sortions de la nef au moment d`atterrir sur la planète Mars. À ce moment là
 nous fûmes observés par une foule de martiens qui nous regardaient avec
 curiosité (...). À partir de ce moment jamais nous n`avons fini de 
révéler nos fantasmes sexuels (...). Maintenant il est plus calme, il
 s`irrite moins avec moi. Notre relation est plus stable.» (F., 29 ans,
 vivant en union libre).

Beaucoup de femmes (surtout les jeunes célibataires âgées entre 18 et 30 ans et quelques femmes divorcés de 25 à 35 ans), partagent avec leurs partenaires sexuels le fantasme exhibitionniste. Comme m`a dit une fille : «quelques fois je dis à mon amoureux de m`imaginer avec une minijupe noire, une blouse décolletée et des souliers à talons hauts » (M., 21 ans, célibataire). 

Les fantasmes exhibitionnistes partagés se sont trouvés presque exclusivement chez les femmes et semblent répondre au besoin de se sentir admirées, convoités et valorisées. La féminité est présente: les filles apprennent très tôt à se mettre en valeur par les vêtements, les bijoux et le maquillage. Par ce biais de séduction elles parviennent à obtenir ce qu`elles veulent de la part des hommes. Quelquefois, ce rôle leur confère un pouvoir qui les stimule sexuellement. Dans les fantasmes exhibitionnistes de striptease ou de séduire les partenaires par la présentation de minijupes et du maquillage, les femmes apparaissent comme la femme fatale, le contraire de la femme caste, épouse et mère. 

Les femmes (surtout les jeunes célibataires) partagent8 aussi d`autres fantasmes avec leurs partenaires: faire l’amour devant le miroir; faire l’amour dans les places exotiques; être sensuellement touchée sur le corps entier; toucher l`autre sensuellement sur le corps entier; être embrassée; embrasser le partenaire; pratiquer le sexe oral et être stimulée oralement par son partenaire; caresser la poitrine de son partenaire et être caressée à la poitrine par l`homme. Ces fantasmes ont une fonction hédoniste. 

Fantasmes érotiques féminins secrets 

Le discours véhiculé par diverses femmes (surtout celles mariées et âgées entre 40 et 65 ans) transmet l`idée que la plupart d`entre elles préfèrent vivre les fantasmes sous forme d`images qu`elles gardent pour elles-mêmes, par crainte ou honte de les partager avec leurs partenaires sexuels:

«Je ne parle jamais de mes fantaisies sexuelles avec mon mari parce que j`ai peur qu`il pense que je suis une dépravée (...). Parfois, j`ai aussi honte de dire certaines choses, je ne sais pas, je suis un peu timide et je ne dis pas, même si j`en ai envie. (I., 42 ans, mariée).

La plupart des femmes mariées (entre 40 et 65 ans) ont des fantasmes érotiques secrets dans l`espace privé - qui n`incluent pas leurs maris, mais surtout des hommes inconnus. Ces fantasmes sont : faire amour avec un homme plus jeune; masturber un homme; être masturbée par un homme; toucher sensuellement le corps d´un homme; être sensuellement touchée sur le corps par un homme; être séduite par un homme et séduire un ou plusieurs hommes, surtout par le striptease. Ce dernier fantasme exprime de nouveau le pouvoir de la femme sur l`homme. Dans ce fantasme exhibitionniste, la femme dirige les opérations et décide du déroulement et de la fin du spectacle. Comme nous dit Pittet (2005): «Par l`exhibition de son corps, elle tient ces hommes à sa merci et cela ne manque pas de lui procurer une grande satisfaction.». (p. 35). Ça veut renverser9 les modèles de l`identité de genre, parce qu`ici la femme a un rôle actif de domination. Comme nous avons déjà remarqué ces femmes ne sont pas en conformité avec le modèle traditionnel de féminité10: ne pas séduire, être séduite pour se marier et avoir des enfants. 

Mais, le renversement de l`identité féminine traditionnelle (ou pourrait-on dire ce dévoilement du versant anti-madone) est fait surtout par les femmes célibataires, les femmes vivent en union libre et les divorcées (âgées entre 18 et 40 ans). Ce renversement est bien présent dans les fantasmes secrets que ces femmes imaginent en contexte privé notamment: séduire et être séduite par plusieurs hommes surtout par le striptease ou la lingerie; pratiquer le sexe oral, faire le «soixante-neuf»; faire l’amour avec plusieurs hommes; faire l’amour avec un homme inconnu; se masturber sous le regard du partenaire et masturber le partenaire. 

Ce renversement de l`identité féminine traditionnelle signalé dans les fantasmes secrets imaginés hors des lieux de rencontres nocturnes, peut être expliqué par différentes transformations socio-culturelles observées au Portugal surtout à la fin des années 70 et dans les années 80, après la révolution du 25 Avril qui a signalé la fin du régime dictatorial. Ces transformations sont associées à un certain affranchissement, à une libéralisation tant au niveau des normes traditionnelles qu`au niveau des habitudes sexuelles des femmes que les ont intériorisées. 

Les facteurs qui ont propulsé ces transformations de libéralisation des comportements sexuels de certaines femmes étaient:

- la divulgation de la contraception orale (pilule) qui a séparé la sexualité de la reproduction; 

- les mouvements néo-féministes qui ont défendu l`égalité d`opportunités pour les femmes et pour les hommes surtout dans les domaines du travail et de l`éducation. Dans la sphère sexuelle les néo-féministes revendiquaient le droit de la femme au plaisir sexuel et proclamaient l`autonomie féminine, en questionnaient la position passive et soumise de la femme; 

- l`expansion des moyens de communication de masse qui véhiculaient l`érotisation de la vie quotidienne, notamment par la publicité, la télévision, la radio, la presse et le cinéma; 

- le développement de la consommation des industries à caractère érotique : industrie de la corporalité (pratique de l’exercice physique, les différents produits de maquillage, les produits diététiques et les régimes, les chirurgies plastiques, entre autres); 

- la diffusion de l`industrie du vêtement lié à la mode (minijupes, blouses et robes avec des grands décolletés); 

- la prolifération des sex-shops, des films érotiques et pornographiques (dans les vidéo/dvd clubs), des bars, pubs et discothèques; 

- l`affaiblissement progressif du contrôle des parents sur les comportements sexuels des jeunes fils et filles. On signale seulement les aspects plus significatifs : avec qui et où ils sortent les soirs; qui et combien sont leurs partenaires sexuels et quelle est la diversité des pratiques sexuelles qu`ils ont.

Ce qu`on observe actuellement, c`est un transfert de l`impératif de fidélité aux parents vers le groupe de pairs. Ce dernier dictes les conduites, les normes, les règles et incite ou demande à avoir certains comportements. Par exemple, à l`adolescence, les individus se sentent plusieurs fois bousculés par leur groupe de pairs afin de démontrer leur habileté à faire des rencontres érotiques (Adelson, 1980). Mais ces pressions du groupe de pairs ne sont pas réservées aux adolescent(e)s. 


CONSIDÉRATIONS FINALES 

Après ce qui a été dit, nous pouvons conclure que les données nous permettent de suggérer l`hypothèse qu`il existe quelques différences de genre très importantes en ce qui concerne les fantasmes en contexte publique et privé. 

Les différences de genre les plus significatives se trouvent surtout dans l`espace public. Ici, les fantasmes masculins secrets (surtout des jeunes célibataires de 18 - 30 ans et des divorcés de 30 - 45 ans), sont en conformité avec le modèle traditionnel de masculinité et suggèrent la domination et l`agressivité phallique : forcer l`autre à avoir des relations sexuelles; inciter deux femmes à faire l`amour pour qu`il puisse les voir (fantasme lesbien) ; faire l’amour avec deux femmes; séduire et faire l`amour avec une femme beaucoup plus jeune que lui, et faire l`amour avec une fille vierge. 

Les fantasmes secrets que les femmes imaginent dans l`espace public sont aussi en conformité avec le modèle traditionnel de féminité. Les jeunes femmes (surtout les célibataires de 18 - 30 ans et les divorcés de 30 - 45 ans), affirment avoir des fantasmes qui reflètent une intimité émotionnelle: aimer la conversation après et avant de faire amour, toucher /embrasser doucement, être touchée/ être embrassée doucement, aimer recevoir des fleurs, marcher main dans la main avec son partenaire. D`autres fantasmes féminins secrets suggèrent l`idée de conjugalité et la reproduction: vivre avec le partenaire ou se marier avec lui et avoir des enfants. Les femmes rapportent aussi des fantasmes qui reflètent une certaine vulnérabilité émotionnelle : être protégée par quelqu'un qui sera son partenaire. 

Dans le contexte privé, et en ce qui concerne les fantasmes masculins et féminins secrets (qui sont surtout des fantasmes imaginés), les différences sont surtout au niveau des individus mariés, âgés entre 40 et 65 ans. Pour les hommes, les fantasmes secrets servent à compenser une relation conjugale routinière et peu stimulante. Quand ils font l`amour avec leurs femmes, ils imaginent qu’ils font l´amour avec d`autres femmes connues surtout dans les bars (relations clandestines, occasionnelles). Quelques individus sont tellement stimulés qu`au moment des fantasmes, ils commencent à dire des gros mots à leurs épouses. Ces hommes ne révèlent pas leurs fantasmes secrets à leur épouse. 

Les femmes mariées (40-65 ans), au contraire, utilisent des fantasmes quand elles sont seules. Ces fantasmes ne se rapportent pas à leurs maris mais à d`autres hommes, surtout des hommes inconnus (ici, hommes et femmes sont pareils : ils imaginent d’autres partenaires que leur conjoint). Ces femmes ont dit qu`elles ont leurs fantasmes imaginés secrets. Ces fantasmes sont: faire amour avec un homme plus jeune; masturber un homme; être masturbé par un homme; toucher sensuellement le corps d´un homme; être sensuellement touchée par un homme; être séduite par un homme et séduire un ou plusieurs hommes, surtout par le striptease (fantasme exhibitionniste, qui signale une stratégie de pouvoir féminin). 

En ce qui concerne les fantasmes secrets en contexte privé, imaginés et parfois réalisés par les femmes et les hommes célibataires, vivant en union libre et divorcés (18 - 45 ans), on constate que ces fantasmes sont semblables, à l`exception des fantasmes masculins du voyeuriste et de pratique du sexe anal, et du fantasme féminin exhibitionniste (séduire un ou plusieurs hommes par le striptease). Les hommes ont des fantasmes qui signalent leur masculinité (activité, domination, désinhibition): avoir des organes génitaux oralement stimulés (sexe oral); pratiquer le sexe anal; faire le «soixante-neuf»; être masturbé; caresser la poitrine d`une femme; voir d`autres personnes faire l’amour; faire l’amour avec une femme inconnue, faire l’amour avec deux ou plusieurs femmes; séduire une femme et être séduit par une femme. 

Les femmes, au contraire, ont des fantasmes qui renversent l´identité féminine traditionnelle que signale la chasteté, la passivité, l`inhibition: séduire et être séduite par plusieurs hommes surtout par le striptease ou la lingerie; pratiquer le sexe oral, faire le soixante-neuf; faire l’amour avec plusieurs hommes; faire l’amour avec un homme inconnu; se masturber pour le partenaire; voir et masturber le partenaire. 

Une question se pose alors: pourquoi ce sont surtout les fantasmes imaginés par les femmes (surtout les jeunes célibataires, vivent en union libre et les divorcées) qui signalent le renversement de l`identité féminine? On croit que ça peut être expliqué par plusieurs transformations socio-culturelles déjà mentionnées. Par contre, ces fantasmes féminins ne sont pas partagés, à cause de la matrice judéo-chrétienne qui modèle les comportements et les pensées des individus. Ces femmes ont de la pudeur, de la honte ou de la timidité, qui fonctionnent comme une sorte d`autocensure en ce qui concerne le partage de ces fantasmes. Mais ont peut mentionner aussi l’hypothèse suivante : les femmes portent en elles les deux versants (madone et antimadone) mais ne peuvent se permettre de contacter l’antimadone qu’en contexte privé et secret. De plus, cette tendance semble moins forte chez les femmes mariées, donc le mariage renforce le pôle « madone » et inhiberait « l’anti-madone ». Peut-être aussi qu’elles se sont donné la permission de me dévoiler leurs fantasmes parce que je suis une femme et anthropologue (non menaçante). 

Les fantasmes masculins et féminins partagés dans l’espace privé montrent quelques différences de genre: les fantasmes masculins sadiques sont expérimentés surtout par les hommes mariés (40-55 ans) et ont une fonction de compensation du quotidien diurne (travail). Les femmes mariées et en union libre (plus jeunes que les hommes, 25 - 40 ans), expriment encore ce type de fantasmes, mais pour elles le scénario masochiste a surtout une fonction hédoniste. 

Les fantasmes masculins imaginés et réalisés partagés en ce qui concerne les jeunes (célibataires et vivant en union libre), se rapportent surtout à la génitalité de l`érotisme et ont une fonction hédoniste. Par contre, les fantasmes imaginés par les jeunes femmes célibataires (25-35 ans) ont une fonction compensatoire liée à la routinisation des rapports érotiques-amoureux, ou à un manque/différence de désir. Les jeunes femmes célibataires (18 - 35 ans) ont deux autres fantasmes partagés qui sont caractéristiques des femmes: le fantasme exhibitionniste et le fantasme d`être dans une île paradisiaque ou dans un contexte exotique. 

Enfin, on remarque le fait que, au contraire de la plupart des femmes, presque tous les hommes (indépendamment de l`âge et de l`état civil) n`ont pas mentionné les fantasmes qui font référence au toucher sensuel du corps d´une femme, à l`exception de toucher sensuellement les seins. Dans une société (comme la notre) les échanges affectifs corporels et verbaux masculins sont découragés sous prétexte qu`ils ne constituent pas des signes de virilité. Pour la femmes, c`est le contraire: elles sont généralement plus sensibles aux marques de tendresse dans l`expression de leur érotisme et, au contraire de la majorité des hommes, l`acte sexuel n`est pas le but recherché. 

Il serait intéressant de voir si les différences significatives relativement aux fantasmes érotiques par des hommes et des femmes peuvent être trouvées en différentes populations, avec des niveaux socio-économiques et culturels plus élevés ou plus bas que la population qui a été objet de cet étude. 





NOTES

1. Anthropologue candidate au post-doctorat (boursière de la FCT – Fondation pour la Science et la Technologie) en Anthropologie Culturelle et Sociale au CEMME (Centre d`Études de Migrations et Minorités Ethniques), Université Nouvelle de Lisbonne/Faculté de Sciences Sociales et Humaines., Av. de Berna, nº 26 C, 1069-061 Lisboa, Portugal.

2. Maria de Guadalupe Brak-Lamy, «De la magie de la nuit à la magie/désenchantement au lit. Pour une interprétation anthropologique des comportements érotiques-amoureux en contexte urbain nocturne. » Thèse de Doctorat en Anthropologie Culturelle et Sociale, 2006, Lisbonne, Université Nouvelle de Lisbonne/Faculté de Sciences Sociales et Humaines.

3. «Le fantasme érotique remplit plusieurs fonctions. La fonction plus évidente est la fonction de plaisir : le fantasme peut contribuer à l´ éveil et à l`activation de l`excitation érotique, tout comme il peut faciliter le déclenchement de l`orgasme. À l´abri du regard social, il donne plus facilement accès à des plaisirs interdits. Dans sa fonction compensatoire, le fantasme permet de suppléer les insuffisances du réel : il corrige une réalité insatisfaisante, limitative ou inaccessible : il peut aussi pallier les effets de la «routinisation», de l`usure érotique conjugale.» (Crépault, 1997, p. 301).

4. «(…) l´agressivité phallique réfère à l`ensemble des conduites (fantasmatiques ou réelles) visant à démontrer la puissance virile et à imposer une domination intersexuelle et intrasexuelle. Cette affirmation virile peut être fondée simplement à travers la symbolique pénienne : le pénis devient phallus, emblème de puissance (ou de impuissance lorsqu`il ne peut remplir sa fonction). La conduite agressive phallique peut être encore plus symbolique en se manifestant à travers la gestuelle, l`habillement, le choix de l`automobile, etc. La visée est la même : dominer par sa force virile (ou masquer une fragilité de son identité masculine ou de ses capacités physiologiques génitales).» (Crépault, 1997, p. 59).

5. «[…] Presque toujours l`homme se sent limité dans son activité sexuelle par le respect pour la femme et ne développe sa pleine puissance que lorsqu`il est en présence d`un objet sexuel rabaissé […]» (Freud, 1969, p. 61).

6. Parfois, le problème réside dans la différence de désir. La femme peut avoir moins désir que son partenaire et emploie des fantaisies pour développer son désir sexuel. Wendy Maltz et Suzie Boss (1997) soutiennent: «Some women use fantasy to help them even out a difference in desire within their relationship. When one partner wants to have sex more frequently than the other, fantasy can help boost the sexual appetite of the less interested partner.» (p.86).

7. «Many women increase desire by imagining they are having sex in a more romantic place than where they usually make love. Women frequently describe secluded island beaches, remote cottages, or sumptuous hotel rooms (…)» (idem, p. 87)

8. Quelques fois, les femmes verbalisent leurs fantasmes au partenaire (fantasme imaginé). D`autres fois, les fantasmes sont agis dans le réel avec le partenaire (fantasmes réalisés).

9. On peut interpréter ce renversement comme une expression de l`un des versants de la féminité : l`anti-madone.

10. L`identité féminine traditionnelle correspond à la madone et non à l`anti-madone.




RÉFÉRENCES

Adelson, J. 1980. Handbook of Adolescent Psychology, New York : John Wiley and Sons. 

Bardin, L. 1977. Análise de conteúdo, Lisboa: Edições 70. 

Brak-Lamy, M. de G. 2006. «De la magie de la nuit à la magie/désenchantement au lit. Pour une interprétation anthropologique des comportements érotiques-amoureux en contexte urbain nocturne », Thèse de Doctorat, Anthropologie Culturelle et Sociale, Lisbonne, Université Nouvelle de Lisbonne/Faculté de Sciences Sociales et Humaines. 

Crépault, C. 1981. L`Imaginaire érotique et ses secrets. Sillery : Presses de l`Université du Québec. 

Crépault, C. 1997. La sexoanalyse. Paris: Payot . 

Freud, S. 1989. «A criação literária e o sonho acordado», In Textos essenciais sobre literatura, arte e psicanálise (selecção dos textos de Anna Freud), de S. Freud, Vol. 2, Col. «Biblioteca
Universitária», Mem Martins: Europa-América, pp. 50-59,
1907. 

Freud, S. 1969. «Sur le plus général des rabaissements de la vie amoureuse», In La Vie Sexuelle, Paris : Presses Universitaires de France, pp. 55-66, 1912. 

Hsu, B. et al. 1994. «Gender Differences in Sexual Fantasy and Behavior in a College Population : A Ten-Year Replication”, Journal of Sex & Marital Therapy, 20 (2) : 103-118. 

Laplanche, J. et J-B. Pontalis. 1968. «Fantasies and the Origins of Sexuality», International Journal of Psychoanalysis, 49 : 1-18. 

Laplanche, J. et J-B. Pontalis. 1990. Vocabulaire de la Psychanalyse, Paris: Presses Universitaires de France, 1967. 

Laplanche, J. et J-B. Pontalis. 1973. The Language of Psychoanalysis, Nova Iorque: W.W. Norton, 1969. 

Laville, C. et J. Dionne. 1999. A construção do saber. Manual de metodologia de pesquisa em ciências humanas, Porto Alegre: Editora UFMG/ Artmed; 

Maltz, W. et S. Boss. 1997. In the garden of desire. Understanding the intimate world of women`s sexual fantasies, Londres: Bantam Press. 

Olivier, M.B. & Hyde, J. S., 1993, «Gender differences in sexuality: A meta-analysis», Psychological Bulletin, 114, 29-51 

Person, E. S. et al. 1989. “Gender Differences in Sexual Behavior and Fantasy in a College Population”, Journal of Sex & Marital Theraphy, 20 (4): 271-302. 

Person, E.S. 1996. Pela força das fantasias - Como construímos as nossas vidas, Rio de Janeiro, Nova Editoral Rocco, 1995. 

Pittet, D.A.. 2005. « Le rôle de l`imaginaire érotique dans la prise en charge de la baisse du désir féminin », Travail de mémoire pour obtenir le certificat de formation continue en sexologie clinique, Genève, Fonds Universitaire Maurice Chalumeau, Université de Genève. 

Vala, J. 1986. «A análise de conteúdo», In Metodologia das Ciências Sociais, sous la dir. de António Santos Silva et José Madureira Pinto, Col. «Biblioteca das Ciências do Homem», Porto: Edições Afrontamento, pp. 101-128.